Thème 2014-2015 : La guerre (?)

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Re: Thème 2014-2015 : La guerre (?)

Message par Prouesse » 21 nov. 2014 15:04

Extrêmement intéressants les livres cette année.
J'ai fini "Le Feu" de Barbusse et "Les Perses" d'Eschyle. J'étais un peu réfractaire à Eschyle mais en fait c'est très bien.
Vivement Clausewitz, le meilleur pour la fin, et pouvoir m'entraîner à quelques dissertations en les longues soirées de décembre. 8)
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KDY

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Re: Thème 2014-2015 : La guerre (?)

Message par KDY » 25 nov. 2014 14:03

Bonjour,
Prouesse a écrit :Extrêmement intéressants les livres cette année. [...] J'étais un peu réfractaire à Eschyle mais en fait c'est très bien.
Vivement Clausewitz, le meilleur pour la fin [...]
"intéressants", "c'est très bien" : pourriez-vous développer votre opinion ? Sur quels aspects ?

Cordialement

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Re: Thème 2014-2015 : La guerre (?)

Message par Prouesse » 28 nov. 2014 18:27

Bonjour KDY,

Je n'ai pas vu votre message, je m'en excuse. J'y réponds dès à présent :

-Concernant Barbusse, j'ai trouvé édifiant son témoignage au plus près d'une escouade, cette immersion (le sous titre de l'oeuvre étant très justement choisi - journal d'une escouade). Cette volonté de transmettre l'authenticité (le langage des Poilus avec cette vulgarité qui leur est propre, leur argot), notamment dans le chapitre "Les Gros mots" où Barbusse se met en scène lui même, interrogé par un autre Poilu pour savoir si il compte troquer les propos des Poilus afin de le rendre plus politiquement corrects et Barbusse, dans un "souci de vérité" dit que non ! (en digne successeur de Zola !)
Barbusse dit la guerre en utilisant des moyens propres au romanesque : personnages attachants, intrigue d'ensemble qui conduit de l'aveuglement quant à la guerre jusqu'à la lucidité de ce qu'elle peut provoquer. Il témoigne de la puissance de la fiction mis au service de la réalité.

De nombreux thèmes de la guerre sont abordés, on y découvre que la dimension épique prêtée au soldats n'est plus (léger contraste avec Eschyle que je développerai après)... Les soldats sont entraînés dans une machination, dans une mission, dans une quête qui les dépasse. La dualité saisissante avec l'arrière, le "bourrage de crâne" propre à cette guerre...
Je pourrai aborder plus en détail, je le ferai si vous souhaitez en débattre.

Quant à Eschyle, l'aspect pièce de théâtre m'a un peu refroidi aux premiers abords. Mais le contexte historique (Perses contre Grecs, guerre médiques) m'a poussé à m'y intéresser vraiment. L'oeuvre est vraiment rapide à lire, mais efficace. On connait la fin. On sait ce qu'il va se passer. On sait que Xerxes va revenir. Dénudé. Exténué. Alourdi par le poids de ses erreurs. Alourdi par son hybris. Salissant la mémoire de son honorable père Darius. L'opprobre peut être à jamais jeté sur lui. Les milliers de morts. De sa faute.
La pièce joue donc sur l'attente. A travers sa mère qui représente à merveille la femme éplorée qui a laissé partir mari (voire fils !) à la guerre. Avec la crainte de ne plus les revoir.... Le messager qui arrive et qui donne enfin des nouvelles.... Et qui appuie bien sur la véracité de ses propos. Ce ne sont pas des on-dit, il a vu de ses propres yeux Xerxes mené dans l'até (l'erreur), s'ayant vu trop beau, trop arrogant.
La dimension épique a toute sa place. Eschyle flatte les Grecs à travers cette pièce. Ils ont vaincu une armée perse dont on ne cesse de rappeler la grandiloquence, la puissance tout au long de l'oeuvre. C'est la victoire d'un peuple sur un autre, mais surtout d'un modèle social sur un autre. Les Grecs se battaient pour leur liberté : où les Perses se battaient sous les ordres d'un seul homme, aveuglé par sa quête de puissance, mal conseillé par ses proches, la pression trop lourde pour ses frêles épaules.
On ne tire aucun nom Grec en particulier de l'oeuvre. C'est la victoire du peuple. A travers les questions naïves de la reine à son messager, extrêmement surprise de constater que les Grecs ne sont ni vassaux ni sujets, Eschyle exprime parfaitement cette différence dans la manière de penser, qui distinguent les Grecs des "Barbares".
Et ce sont les Grecs qui ont gagné.
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KDY

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Re: Thème 2014-2015 : La guerre (?)

Message par KDY » 03 déc. 2014 02:36

Prouesse a écrit :Les soldats sont entraînés dans une machination, dans une mission, dans une quête qui les dépasse.
Peut-on croire que la guerre est un moyen spécifique de dépouiller les hommes de leur liberté ? Autrement dit, doit-on considérer un soldat prêt à sacrifier son souffle au nom de la victoire comme étant une pure victime de la guerre ? Qu'est-ce qui peut pousser un homme à s'engager dans le guerre ?

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Re: Thème 2014-2015 : La guerre (?)

Message par Prouesse » 04 déc. 2014 20:20

KDY a écrit :
Prouesse a écrit :Les soldats sont entraînés dans une machination, dans une mission, dans une quête qui les dépasse.
Peut-on croire que la guerre est un moyen spécifique de dépouiller les hommes de leur liberté ? Autrement dit, doit-on considérer un soldat prêt à sacrifier son souffle au nom de la victoire comme étant une pure victime de la guerre ? Qu'est-ce qui peut pousser un homme à s'engager dans le guerre ?
Bonsoir,

Vous soulevez des questions extrêmement intéressantes. J'y réponds demain soir.

Cordialement,
#OKLM

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Re: Thème 2014-2015 : La guerre (?)

Message par Prouesse » 05 déc. 2014 21:04

Bonsoir,

J'ai pris 30 minutes de ma matinée pour donner un début de réponse à ces questions. J'ai scindé les réponses : une pour chaque interrogation que vous soulevez, ce n'est pas la "manière" de procéder mais je ne prétends pas fournir une dissertation, juste des éléments de réponse assez succincts pour proposer un début de débat. Je précise que je n'ai pas encore fini Clausewitz (je tente de l'analyser paragraphe après paragraphe... et il est diablement riche ce livre !)

Question 1 : Peut on croire que la guerre est un moyen spécifique de dépouiller les hommes de leur liberté ?


J'ai trouvé votre terme "dépouiller" un peu fort. Probablement était ce voulu de votre part. Appuyons nous sur Clausewitz pour progresser dans l'argumentation. La guerre ne peut être prise seule, comme unité autonome. Elle ne constitue effectivement qu'un moyen qui vise à atteindre le dessein politique ; celui-ci constituant l'objectif initial du départ en guerre. Quel chef d'Etat utiliserait la guerre dans le seul but de dépouiller les hommes de leur liberté ? La réponse est évidente : très peu, voire aucun, d'autres moyens existant, plus efficaces, moins coûteux et moins ostentatoire. Mais la guerre peut avoir comme consquénces, indirectes, de prendre aux hommes une part de leur liberté. Au sens le plus commun d'abord : Barbusse nous retranscrit le quotidien des tranchées où il apparaît clair que ces hommes ne disposent plus d'une partie de leur liberté. Ils sont soumis à des ordres, qu'ils ne peuvent contester, sont dépendants d'un ravitaillement. J'écarte volontairement l'arrière, considérant dans cette première réponse uniquement le front. Corrigez moi si je me trompe.
Les hommes ne sont plus à considérer uniquement comme des entités individuelles mais comme un corps. Ce passage d'un volume microscopique où chaque homme apparait distinctement à un volume macroscopique où l'on ne voit plus que l'ensemble des soldats ne peut se faire sans perte de libertés individuelles. Chacun doit y sacrifier une part.

La guerre n'apparaît donc pas comme un "moyen spécifique" pour retirer aux hommes leur liberté, mais il s'agit d'une conséquence s'appliquant à une part importante de la population.

Question 2 : Doit un considérer un soldat prêt à sacrifier son souffle au nom de la victoire comme pure victime de la guerre ?

A partir du moment où un soldat entre en guerre, sa mort, dans un contexte "guerrier" le fait entrer dans cette catégorie, suscitant le respect (posthume certes) de ses compatriotes, de victime de la guerre. En témoigne ces nombreux monuments aux morts, à la gloire de ces hommes "morts pour la France" ou encore de cette "Tombe Du Soldat Inconnu". Ceci constitue le point de vue "officiel". Votre question induit et présuppose que ce soldat était prêt à mourir pour cette cause, acceptant par là que le tribut à payer pour la victoire était lourd. Il constitue ainsi une pure victime de la guerre.
Je rajoute une idée à laquelle je viens de penser puisque j'analysais Clausewitz tout à l'heure. Rappelons que la guerre n'est qu'un moyen pour parvenir à une fin politique. Un soldat mort en guerre constitue il seulement une victime de la guerre, ou d'une machine bien plus importante que ça ? Le côté épique s'envole si on l'associe uniquement à une fin politique, mais elle est néanmoins présente. A la manière d'un archéologue qui creuse, on remonte progressivement le fil : le soldat est mort en guerre, guerre elle même provoquée dans un dessein politique. Le soldat ne serait il pas alors une victime politique ? Une victime d'un projet qui engloberait la guerre ? Ceci est à chercher plus en profondeur.


Question 3 : Qu'est ce qui peut pousser un homme à s'engager dans la guerre ?

Les raisons sont diverses et la multitude de cas particuliers nous pousse à proposer un modèle simplifié des choses. Globalement, on peut distinguer deux catégories :
-Les hommes volontaires pour la guerre
-les autres, enrôlés contre leur volonté, réquisitionnés au nom de la sainte Patrie.

Dans cette dualité apparaît alors un lien avec la première interrogation. La deuxième catégorie de personne est ainsi privée de leur liberté de choix. Tandis que les premiers pour qui la guerre est un choix assumé, ne s'opposant pas à leur volonté, conserve ladite liberté.
Cette opposition est magnifique illustré par Eschyle. Les Perses mettent en scène cette opposition de façon hyperbolique : deux continents qui s'affrontent. Les Grecs se battent directement pour leur libertés, pour conserver leur sol ô combien fertile. A cela s'oppose les Perses, supérieurs en nombre et en puissance, guidés par Xerxès, despote perse, qui donnent des ordres à ses hommes sur lesquels ils disposent du droit de vie ou de mort "Si les Grecs réchappent au désastre, que chacun d'entre vous aient la tête tranchée".



Je vous interroge alors. Par guerre, il me semblait que vous entendiez uniquement le contexte militaire, le front. Corrigez moi si je me trompe.
Si tel est le cas, il me paraît alors important de nuancer ce propos, puisque la guerre ne peut être réduite à ça. Ce serait négliger les fins politiques, la gestion des ressources, les différentes stratégies....


P-S : Je ne suis absolument pas satisfait de mes réponses en l'état actuel.
P-S 2 : Vos questions très intéressantes méritent donc une réponse plus poussée de ma part.
PS3 (j'en vends une)
PS4 (je vais l'acheter)

Cordialement,
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