Pourquoi déteste-t-on les maths ?

vous avez des questions sur la vie en prépa ?

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Pourquoi déteste-t-on les maths ?

Message par Nathan22 » 12 sept. 2018 19:24

Un article très intéressant sur le sujet qui ouvre à la réflexion ---> http://www.slate.fr/societe/pourquoi-de ... -les-maths

Je cite "Voilà plus de dix ans que j’enseigne les mathématiques, et la simple annonce de ma profession suffit généralement à égayer les soirées, ou en tout cas à offrir des sujets de conversation tout faits aux personnes qui se trouvent face à moi. Leur réaction est double: lorsque je prononce le mot «prof», on peut lire dans leur regard quelque chose qui ressemble soit à de l’admiration, soit à de l’empathie. Lorsque j’ajoute «de maths», voilà leurs yeux qui se mouillent, l’écume qui naît à la commissure de leurs lèvres, mille anecdotes gorgées de douleur qui leur reviennent en tête.

" Le tout en s’appuyant toujours sur le même sketch de Gad Elmaleh, dans lequel l’humoriste évoque l’inutilité des racines carrées et de l’utilisation d'un compas.""

"L'école devrait apporter de l'épanouissement, mais du côté des mathématiques, ce sont l'anxiété et la frustration qui priment"

"En 2013 sortait Comment j’ai détesté les maths, un documentaire dans lequel le réalisateur Olivier Peyon promettait de se pencher sur le cas singulier de cette matière qui n’est pas loin de faire l’unanimité contre elle. Le film a beau être intéressant, j’avoue qu’il m’a frustré: s’installant rapidement dans la classe d’un génial prof de classe prépa nantais, puis allant interroger Cédric Villani et quelques chercheurs de très haut niveau, Olivier Peyon semblait surtout là pour mettre en valeur la beauté des mathématiques, leur caractère stimulant, voire leurs applications concrètes. Une démonstration assez convaincante mais frôlant le hors-sujet, la question du dégoût des mathématiques chez les jeunes et les moins jeunes n’étant quasiment pas traitée dans le film."

"Ayant enseigné en collège avant d’atterrir dans un lycée général et technologique en 2014, j’ai effectivement pu constater à quel point la classe de seconde pouvait être une souffrance pour les élèves, notamment au niveau des mathématiques. Pendant toutes leurs années collège, on leur décrit le lycée comme un tremplin vers la vie d’adulte, la vie active, la réalisation de leurs rêves. En fin de compte, à quoi ressemble la seconde? À une troisième bis dans laquelle la plupart des disciplines restent obligatoires et communes à toutes et tous. Seul le choix de deux enseignements d’exploration (des matières supplémentaires, pour résumer) peut donner aux élèves une impression d’être enfin décisionnaires."

"Chaque année, je retrouve donc en classe de seconde des élèves au profil clairement littéraire, ou qui ambitionnent d’intégrer dès la première une section technologique peu riche en enseignements scientifiques. Pour ces élèves-là, travailler sur les cosinus ou les intervalles de fluctuation peut effectivement sembler totalement inutile."

"D’après l’une des études scientifiques menées sur le sujet, les difficultés en mathématiques pourraient être dues à un problème de mémoire procédurale, la même qui fait que «nous construisons une phrase grammaticalement juste, sans y penser, ou que nous conduisons une voiture sans réfléchir et sans verser pour autant dans le fossé». Il ne s’agirait donc pas simplement d’un problème de travail ou d’apprentissage, comme se tue à le répéter la quasi-totalité des profs de mathématiques de France et de Navarre, mais bien d’une différence de structure du cerveau. Même avec la meilleure volonté du monde, une partie des élèves n’a juste pas la capacité de comprendre les subtilités de cette discipline"

"Et que s’il est bon d’essayer de mener chacun et chacune vers un niveau supérieur (en maths comme ailleurs), il est un peu stupide de stigmatiser les élèves pour qui cela semble insurmontable. Lors de mes échanges avec les élèves, deux des phrases que je répète le plus souvent sont «Non, tu n’es pas nul/nulle en maths» et «Tout le monde ne peut pas réussir en maths» (il y a aussi «Mets-toi au travail» et «Donne-moi ton carnet»). Le but n’est pas de transformer le lycée en École des Fans où tout le monde semble digne de recevoir des félicitations, mais simplement de dédramatiser."

"«Je refuse qu’on évoque les maths en termes d’utilité ou de non utilité», intervient Benoît, prof de maths dans un lycée du Loiret. «Il s’agit avant tout de muscler sa logique et d’acquérir une culture scientifique" "C’est là un des grands débats qui agitent la profession. À quoi servent les maths? Mais avant tout, faut-il absolument que les maths servent à quelque chose?"

"Depuis quelques années, de nombreux rapports insistent sur l’importance de «donner du sens». Officiellement, il n’est plus question de donner à ses élèves une liste de vingt expressions littérales à développer et réduire. Dans le programme de quatrième, au rayon calcul littéral, on trouve par exemple cette phrase: «Les situations proposées doivent exclure tout type de virtuosité et viser un objectif précis»."

"L’objectif est d’éviter que les maths ne deviennent une langue morte, pratiquée seulement par une poignée d’irréductibles capables d’en maîtriser la grammaire. "

"De nos jours, la phobie liée aux maths est devenue sociétale. La peur liée aux fractions, aux logarithmes ou au théorème de Pythagore se transmet comme une sorte de tradition orale. Une étude américaine a même mis en évidence l’influence des angoisses mathématiques des parents sur celles de leurs enfants, avec cette conclusion: si les maths vous mettent la rate au court-bouillon, n’aidez pas vos enfants à faire leurs devoirs car vous risquez de leur transmettre votre anxiété… laquelle peut même entraîner d’atroces migraines, affirme une autre étude."

"La détestation des maths provient également de son évident manque de swag. Dans les films et les séries, les scientifiques sont généralement des types aux cheveux sales et aux lunettes double foyer, qui n’aiment rien tant que résoudre des problèmes complexes pour aider les personnages principaux à avancer dans leur quête. La série Big Bang Theory a d’ailleurs le mérite de mettre ces science nerds sur le devant de la scène… sauf que ce sont des physiciens. Sans être ultra populaires, les sciences physiques bénéficient notamment de leur aspect plus ludique. Champs magnétiques, tubes à essai et compagnie: la physique et la chimie sont plus attractives parce que leur sens concret est souvent plus immédiat, plus visuel"


"Au sein du lycée où j’ai effectué deux ans de classe préparatoire scientifique, il y avait également une prépa littéraire. Si les deux sections respectaient globalement la parité (à peine plus de garçons en maths sup, à peine plus de filles en hypokhâgne), il était frappant de constater à quel point les personnalités les plus ouvertement intéressantes se trouvaient du côté des littéraires. Des gens cultivés, avec des choses à dire, des opinions politiques, une vision de la société. De notre côté, nous ressemblions à des gnômes verdâtres qui couraient d’une salle de maths à une salle de physique avant de se ruer jusqu’à notre chambre d’internat pour y engloutir des leçons et des exercices."

"Bref, personne n’a envie de ressembler à Napoleon Dynamite. Pas plus qu’à Cédric Villani. Médaille Fields en 2010, celui qui est actuellement député La République en marche de l’Essonne a été pendant quelques années un invité récurrent sur les plateaux de télévision français. Avec tout le respect que je dois à ce génie des mathématiques, je doute que son image ait contribué à populariser les mathématiques auprès des jeunes. Passons sur la lavallière et la broche araignée qui font de lui un personnage à part (ce qui est tout à fait son droit): au cours de ses nombreuses interventions médiatiques, Villani a montré son incapacité à se mettre au niveau de son auditoire."


Devrions nous autant mettre l'accent sur les mathématiques en France (dans l'enseignement secondaire) contrairement à d'autres disciplines (scientifiques OU littéraires) ? Faudrait-il partiellement ou complètement enlevé les maths dans certaines filières de l'enseignement secondaire ?

Les profs enseignent-ils mal les Mathématiques ? Doivent-il se former à d'autres pédagogies ?

Quelles solutions envisageriez-vous pour rendre les mathématiques plus digestes et attrayantes aux élèves ?

Merci de vos expériences et remarques.

P.S. J'ai republié ce post dans cette rubrique que je trouve plus appropriée.

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Re: Pourquoi déteste-t-on les maths ?

Message par bullquies » 12 sept. 2018 19:38

Témoignage de quelqu'un qui est devenu prof de maths presque par hasard, après avoir "détesté" les maths toute sa vie :

https://www.youtube.com/watch?v=PXwStduNw14

Il fait un parallèle entre la musique, qu'on l'a d'abord forcé à apprendre et qui ne lui a donc pas plu au début, mais qu'il a ensuite adoré quand il a cherché à l'apprendre par lui-même pour impressionner les minettes. Et le fait d'avoir la capacité de créer est ce qui lui a donné goût à la musique.

Les mathématiques sont d'après lui un sens, comme le sens du toucher ou de la vue, dans la mesure où elles nous permettent de voir le monde sous un autre angle (relations, liens logiques, structures). Cela nous permet de tisser des liens entre des choses qui n'ont a priori rien avoir : les branches d'un arbre et le delta d'un fleuve ? Gravité, électromagnétisme et mécanique des fluides ? Informatique théorique et trous noirs ?

Tant que les gens ne voient pas les maths comme un sens à affûter, mais uniquement comme une corvée, ils n'aimeront pas ça. Et c'est bien normal :)
The Axiom of Choice is obviously true, the Well-Ordering Principle is obviously false, and nobody knows about Zorn's Lemma. - Jerry Bona

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Re: Pourquoi déteste-t-on les maths ?

Message par father » 12 sept. 2018 20:44

Il y a des points contestables dans l article..
Le fait par exemple que les filières techno (sti2d) n auraient pas besoin des maths... le niveau en termes d abstraction n y est peut pas tres élevé mais faire de la techno sans maths, cela me semble dommageable.
Mais on ouvre un 2eme point relatif a l image de la techno.
Sur le sens pédagogique de Villani, il y a aussi a discuter. Le film sur les mathématique s de la chauve souris est sympa. Ce n est que de la vulgarisation mais plutôt sympa.

Qu il y ait des individus réfractaires aux maths, c est entendu mais il y a des progres a faire..
Au moins 3 pistes :
Comment les sciences sont enseignees au primaire.
Pourquoi une 2nde indifferenciee. Jadis il y avait des 2nde C..
Comment relier les maths au reel. Comprendre le monde n est pas une nécessité. Mais c est tellement plus utile que de regurgiter des recettes toutes prêtes.
L overdose de certains eleves vient également de là. Cherche t on vraiment a ce qu ils comprennent..

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Re: Pourquoi déteste-t-on les maths ?

Message par rickyy » 12 sept. 2018 21:59

"Au sein du lycée où j’ai effectué deux ans de classe préparatoire scientifique, il y avait également une prépa littéraire. Si les deux sections respectaient globalement la parité (à peine plus de garçons en maths sup, à peine plus de filles en hypokhâgne), il était frappant de constater à quel point les personnalités les plus ouvertement intéressantes se trouvaient du côté des littéraires. Des gens cultivés, avec des choses à dire, des opinions politiques, une vision de la société. De notre côté, nous ressemblions à des gnômes verdâtres qui couraient d’une salle de maths à une salle de physique avant de se ruer jusqu’à notre chambre d’internat pour y engloutir des leçons et des exercices."
Ce cliché...

La culture scientifique, ça existe aussi, avoir une compréhension (un peu plus évoluée que la règle de trois) des statistiques, des probas, de l'informatique, de l'electromag, de la méca, des piles, des équadiffs, (je continue ?) je pense que ça aide à comprendre le fonctionnement du monde et de la société.
Entre un monde où tout le monde peut me parler des grands auteurs du XVII ème et un monde où tout le monde comprend les principes des biais statistiques, je crois que je prends le second.
MPSI-MP*, Hoche -> ENS Rennes, Maths -> Doctorat, chargé de TD à l'ENS Rennes. -> Prof.

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Re: Pourquoi déteste-t-on les maths ?

Message par Profsn » 13 sept. 2018 00:09

ça me rappelle une discussion que j'avais eue avec un jeune collègue (j'enseigne depuis 21 ans) il y a quelques années ; cela concerne l'informatique mais je pense que c'est transposable à l'enseignement des mathématiques. Il était quelque peu désespéré de constater que les élèves ne comprenaient rien, ne faisaient rien, ne s'intéressaient à rien ... bref l'envie de démissionner pointait le bout de son nez.
Ce qu'il n'avait pas compris c'est que lorsqu'on est enseignant, dans la majeure partie des cas, on a été de bons élèves voire de très bons, en tous cas des élèves bosseurs. Or les élèves qu'on a en face de soi, c'est pas nous ! enfin quelques uns peut-être seront enseignants ou ingénieurs mais très peu finalement. Il faut réussir à se mettre à leur niveau, comprendre que ça ne sert à rien de répéter à l'envie et à longueur de conseils de classe que l'élève doit travailler plus, qu'il ne fiche rien; il faut les prendre par la main, leur donner envie et les faire progresser. C'est très difficile surtout avec une classe de 30 élèves, tous différents avec des difficultés différentes.
Sinon ce matin, avec mes BTS SN, on a développé une classe C++ modélisant les fractions. On a donc dû recréer les opérateurs arithmétiques associés à ces fractions. Plus de la moitié ne savaient plus additionner deux fractions ! En réalité, ils savaient mais ils cloisonnent. C'est à dire que, étant donné que je suis le prof d'informatique, ils estiment que je n'ai pas la légitimité de faire des maths. Cela signifie qu'ils n'ont toujours pas compris qu'on ne fait pas des maths pour des maths. (pour une fois qu'ils pouvaient implémenter l'algorithme du calcul du pgcd :( )

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Re: Pourquoi déteste-t-on les maths ?

Message par Hibiscus » 13 sept. 2018 01:57

rickyy a écrit :
12 sept. 2018 21:59
La culture scientifique, ça existe aussi, avoir une compréhension (un peu plus évoluée que la règle de trois) des statistiques, des probas, de l'informatique, de l'electromag, de la méca, des piles, des équadiffs, (je continue ?) je pense que ça aide à comprendre le fonctionnement du monde et de la société.
Entre un monde où tout le monde peut me parler des grands auteurs du XVII ème et un monde où tout le monde comprend les principes des biais statistiques, je crois que je prends le second.
Bawi tu prends le second. Mais il n'existe pas :)
Et lors de ces interminables et stupides diners mondains ou tu es invite, ne serait-ce que pour saluer les voisins de quartier, tu seras peut-etre moins mal a l'aise en disant "bonzour ze suis romancier" que "je suis une brute en maths, je suis la terreur des tableaux noirs". :oops:
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Re: Pourquoi déteste-t-on les maths ?

Message par Simon Billouet » 13 sept. 2018 08:33

Le thème et les messages sont hors-sujet (et fortement capables de partir en troll assez vite). Je verrouille donc.
Professeur de mathématiques et d'informatique en PCSI au lycée Champollion.

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