Ce qu'il ne faut pas attendre d'une école d'ingénieurs - Ce qu'il faut au contraire savoir

Si vous avez une question sur une école, sur la formation proposée, les options, les débouchés.
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Ce qu'il ne faut pas attendre d'une école d'ingénieurs - Ce qu'il faut au contraire savoir

Message par Jay Olsen » 12 juil. 2017 20:29

Bonsoir,

Voilà un texte destiné à tous les Jean-Jacques* présents sur ce forum, ou en tout cas au petit côté Jean-Jacques que beaucoup de taupins possèdent.
*Vous verrez tout de suite ce que ça veut dire en lisant ledit texte.
Dans le message suivant car il est beaucoup trop long.
Il vous sera utile notamment pour savoir à quoi vous attendre lors de votre toute prochaine intégration.

Le texte ne contient pas trop de jugement de valeur, il est majoritairement factuel.
Libre à vous de porter un jugement de valeur "c'est bien"/"c'est mal" à propos de ce qui est décrit.

Mais l'important est que je vous livre mon interprétation actuelle :
Malgré le ton plaintif du texte, il ne faut pas le prendre comme ça. Il faut plutôt que se dire que c'est comme ça que les choses fonctionnent et que c'est très bien ainsi. Il y a des raisons valables qui expliquent pourquoi les choses fonctionnent ainsi.
Alors ne faites pas comme l'auteur du texte qui a l'air de se plaindre, lisez et acceptez ce que vous lisez comme la réalité. Ce sont les règles du jeu, faites avec.

Après on peut toujours débattre des problématiques soulevées.

Je parle de l'ENSX qui est un nom générique pour une école A/A+, je ne suis pas certain que le texte s'applique aussi bien aux ENS ?
Pour l'X je ne suis pas certain non plus.



Edit du titre suite à une lecture passionnante dans la suite du topic :
Vous devez absolument lire cet article, de préférence après mon post ci dessous.
https://www.cairn.info/revue-francaise- ... age-37.htm
Ca clarifie tout.
Il est évident que si vous entrez en école l'an prochain vous devez tout faire pour vous approcher du comportement des héritiers.
Peut-être avec une stratégie du B si vous tenez à certains échanges académiques ou options un peu sélectives.. mais bossez ça le week end, comme les vrais héritiers qui s'investissent à fond sur le campus et obtiennent tout ce qu'ils souhaitent par la suite grâce au combo académique-sérieux managérial

Pour tous les nouveaux arrivants en école qui sont choqués par les comportements de buveurs de toute la promo, lisez ceci :
https://www.cairn.info/revue-societes-c ... m#re30no30
Dernière modification par Jay Olsen le 23 sept. 2017 14:59, modifié 3 fois.
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Re: Ce qu'il ne faut pas attendre d'une école d'ingénieurs

Message par Jay Olsen » 12 juil. 2017 20:29

Nos chères écoles d'ingénieurs.
Cet article n'a pas pour but, contrairement à ce que laisserait penser le titre, de s'intéresser au cout de ces écoles. L'auteur est conscient que la problématique existe mais préfère s'attaquer à divers autres aspects plus ou moins gênants. Ce texte mélange généralité (Jean-Jacques dans la suite) et expérience personnelle. Il n'aborde pas certains aspects qui ne relèvent plus de la compétence de la direction des études mais qui restent gênants (conditions de logement, frais de scolarité, qualité des cours à l'étranger). En dépit du titre de cet article, ce texte ne concerne qu’une seule école d’ingénieurs, désignée par « l’ENSX », qui a vocation à rester anonyme. Certains aspects peuvent ou ne peuvent pas être applicables à d’autres écoles d’ingénieurs.

Comment se déroule un cursus prépa + école, y compris dans des prépas et écoles "du top" ?
Tout commence par la prépa. Un condensé d'enseignements scientifiques de qualité. Il manque simplement quelque chose, un début de réflexion sur l'orientation professionnelle et les réalités du métier d'ingénieur. La plupart des taupins visent "une grosse école généraliste" pour délayer leur choix de carrière. Certains iront même choisir une école relativement spécialisée sous prétexte qu'elle est mieux classée qu'une autre, dont le domaine aurait pu plus leur plaire.

Une fois arrivé en école, on y bénéficie d'une "pédagogie innovante" qui s'appuie sur des cours traditionnels, scientifiques, des enseignements d'ouverture (économie, finance, droit..), mais aussi des enseignements humains (appelés parfois humanités ou autre appellation bizarroïdes), mais aussi des projets, des stages, et des semestres/années à l'étranger. Nous aurons l'occasion de revenir sur chacun de ces points.

Le jeune taupin passionné de sciences, appelons le Jean-Jacques, qui rêvait d'une ENS risque un choc des civilisations assez violent une fois arrivé en école d'ingénieurs, aussi bien classée soit-elle. Appelons la "l'ENSX". Il y découvre un climat décontracté, limite hostile au travail s'il est scientifique. Les cours scientifiques* sont assez peu nombreux, par exemple 4 par semestre en première année dans ma chère école. Et pas 4 cours difficiles..
*La notion de cours scientifique ou non reviendra dans cet article. Certains nous diraient qu’un cours d’économie est scientifique, par exemple. Ceci n’est pas tout à fait vrai d’après l’ENSX. L’ENSX range ses cours dans différentes cases comme : « sciences de l’ingénieur », « mathématiques », « sciences de l’entreprise », « humanités » (ou appellations similaires), ainsi d’après cette définition, qui fait foi à l’ENSX, un cours d’économie est un cours de sciences de l’entreprise et n’est pas un cours scientifique à proprement parler. Fermez la parenthèse.

L'intérêt et la difficulté des cours

Le plus souvent, les profs de prépa sont d'excellents pédagogues et ils disposent d'un cours construit et éprouvé, efficace pour préparer ses élèves aux concours. En école la situation change, sur ces deux aspects. Concernant le fait que la prépa soit un système guidé alors que l’école d’ingénieurs doit laisser l’élève ingénieur se débrouiller tout seul, comme pour le préparer à la suite de sa vie, cela est normal. Sur l’autre point c’est totalement anormal.
Jean-Jacques se rend à un cours, disons de statistiques, à l'ENSX. Il sera choqué par deux choses : la difficulté du cours au premier abord. En fait due à l'incapacité totale du professeur, monsieur V, à structurer son propos. Deuxièmement, l'immense facilité avec laquelle il pourra tout de même valider le contrôle, une fois qu'il aura travaillé grâce aux supports de cours adaptés. Due à la faible contenance scientifique dudit cours... Heureusement, certains professeurs sont meilleurs que monsieur V.

A vrai dire, un Jean-Jacques typique, dans la totalité de la durée de son parcours, ne trouvera que un ou deux cours difficiles. Par difficile j'entends qu'il devra le réviser plus que la veille au soir. Genre deux ou trois jours avant. Et ce sur la totalité de la durée du cursus.

L'immense majorité des cours, y compris certains réputés "difficiles" sont en fait accessibles suite à une bonne soirée de révisions. Malgré cette facilité déconcertante, certains se débrouillent encore pour rater ces contrôles. Et là la politique de l'ENSX est surprenante.

Les rattrapages, si vous rentrez on ne vous laissera pas sortir sans diplôme
Il faudrait le faire exprès pour ne pas sortir diplômé. La seule manière de se faire virer c'est de cumuler mauvais comportement + mauvais résultats. La seule manière de foirer un contrôle c'est de ne pas l'avoir révisé, c'est à dire moins qu'une soirée.
1 - Que se passe-t-il si vous foirez un contrôle ?
2 - Vous le repassez.
3 - Et si vous foirez de nouveau ?
4 - Retour au point 2.
Petite précision : "foirer" un contrôle, c'est ne pas atteindre un niveau de compétence "basique" sur les sujets en question.
Ainsi, certains élèves vont passer le contrôle et ses rattrapages, d'années en années, retardant parfois l'obtention du diplôme (qui nécessite de valider tous les cours), de un ou deux ans. Certains (rares) élèves obtiennent leur diplôme en ayant mis 5 ans pour valider le contrôle de mathématiques de première année ! L'élite de la nation vous disais-je !

A ce stade semble apparaitre une contradiction : les cours et les contrôles sont faciles, mais certains élèves ratent quand même ceux-ci année après année ? En réalité, c’est exactement cela qu’il se passe. L’explication tient simplement au fait que certains élèves ne travaillent tout bonnement pas leurs cours du tout. C’est insuffisant même pour réussir un contrôle facile.

Comble du scandale, les élèves qui ont réussi à se faire virer (je ne sais pas par quel miracle) réussissent à négocier leur entrée dans une autre école du groupe A, et ce sans passer le concours associé, sous prétexte qu'ils ont réussi le concours pour l'école A+ initialement :D

Les contrôles en eux-mêmes

A quoi cela mène-t-il ? Un relâchement général. Il suffit d'aller en cours et de réviser la veille pour valider, alors forcément.. Certains décident de ne même plus aller en cours et de réviser uniquement chez eux. Ils bachotent.
Les contrôles scientifiques tournant toujours autour de la même méthode, il est très efficace de ne retenir que les éléments de modélisation liés au cours. Le calcul scientifique et le raisonnement acquis en prépa feront le reste. Pour certains contrôles, les documents sont mêmes autorisés, permettant de ne pas avoir à retenir les connaissances nécessaires. Il faut préciser à ce moment que cela est normal, dans la réalité, il n’y a aucun surveillant pour interdire à un ingénieur de consulter tel ou tel document utile, y compris ses livres de cours. Cependant, on peut regretter que les professeurs ne profitent pas de l’autorisation de tous livres, documents et ordinateurs pour proposer des contrôles de connaissance plus difficiles, qui nécessiteraient plus de réflexion.

Evidemment, ne pas aller en cours nécessite de travailler chez soi un petit peu plus que la veille uniquement. Mais cela reste bien plus efficace qu'un cours, car le professeur distille une masse d'informations pas forcément directement utiles au contrôle, mais utiles à l'ingénieur, de la culture scientifique simplement. Ainsi les camarades de Jean-Jacques, ou bien lui même s'il se blase, ne vont plus en cours (ce n'est pas obligatoire) et ratent une grande partie du savoir dispensé.

Quand Jean-Eudes, camarade absentéiste de Jean-Jacques, rejoint son ami en cours, il doit le plus souvent subir les jérémiades du professeur en début de cours, qui se plaint que son amphi est plus ou moins vide. Jean-Eudes lassé par tant de négativité ne reviendra plus en cours. Le record à battre, de mémoire d’élève, est un professeur ayant, sur un cours de 9 séances, reçu un taux de présence d’environ 1 à 3% suivant les sources. Personne ne sait vraiment car personne n’y est allé. L’appel n’est évidemment pas effectué* et personne n’a supporté ce professeur sur une durée telle que 3x9 heures.
*Si l’appel avait été effectué, il aurait été fait de manière inversée (noter les présents et non les absents) pour d’évidentes raisons, on sait faire preuve d’un minimum d’intelligence tout de même.

Pour résumer ces points, l'élite scientifique de la nation gaspille son potentiel scientifique en suivant des cours relativement basiques, sans forcément aller chercher un haut niveau de compétence technique (s'il n'y a pas de classement de sortie il n'y a aucun intérêt à améliorer son niveau).

Ce gaspillage est-il si grave ? Ce n’est pas sûr. Jean-Jacques, fraichement arrivé sur le marché du travail, pourra constater que malgré ce relâchement, lui et ses camarades de promotion ont un niveau scientifique en moyenne supérieur à ceux sortis d’écoles moins prestigieuses. La rumeur court que certains diplômés d’écoles C/D ne savent plus comment projeter un vecteur du plan…
Pour autant, ne serait-il pas bénéfique de débuter sa vie professionnelle sur les meilleures bases scientifiques possibles ? Cela demanderait de supprimer l’hostilité ambiante envers le travail, surtout s’il est scientifique, théorique ou académique.

Un élève ingénieur peut même décider d'orienter son parcours vers des domaines moins techniques, et arrêter complètement les sciences dures dès la fin de la première année.

S'il y a si peu de cours scientifiques, alors à quoi diable Jean-Jacques passe-t-il son temps ?
Plusieurs éléments
Les cours non scientifiques
Sur ce point, pas grand-chose à dire. Ces cours là sont très intéressants (économie, finance, droit, je vous vois déjà monter sur vos grands chevaux, mais chez nous de l'éco/finance ça n'est pas scientifique, déjà que les cours scientifiques sont relativement simples, il n'y a aucun contenu mathématique dans un cours d'économie ou de finance de tronc commun, ce qui me fait dire que ce ne sont pas des cours scientifiques) en eux-mêmes, apportent une culture qui sera directement utile au futur ingénieur (analyser le bilan d'une entreprise pour savoir où on met les pieds, connaitre ses droits au travail, etc..). Les intervenants sont souvent de bonne qualité. Ah si, juste un souci. Vous vous souvenez de ce que je disais relativement à l'assiduité et la difficulté des contrôles ? Les contrôles liés à ces cours sont souvent des QCM en classe, le pire cas était un e-learning à faire chez soi. Pire cas car des membres de l'association informatique du campus ont su développer un code qui automatise la réalisation de ce e-learning. Ces contrôles QCM sont presque aussi faciles que l'exécution d'un programme informatique comme précédemment : ils se répètent d'année en année. Il suffit donc de bachoter pour avoir 18/20. Jean-Jacques ayant été honnête et ayant révisé normalement sans bachoter les QCM, il a obtenu une moins bonne note au contrôle de finance que la plupart de ses camarades bachoteurs. On ne l'y reprendra pas à deux fois.

Les projets
La pédagogie par projets est aussi une valeur forte de l'ENSX. Là elle fait plutôt bien, et on a du mal à y trouver de vrais points négatifs.
Ah si, peut-être la possibilité de tomber sur une équipe projet complètement démotivée et/ou la possibilité de faire passer un projet complètement vide de contenu pour un super projet en faisant une présentation meublée. J’ai eu la chance de pouvoir éviter ces écueils. Il est également possible, dans une certaine mesure, d’être proactif afin d’éviter ces soucis.

Les humanités

Un bon ingénieur doit disposer, en plus de ses qualités techniques, d'un certain savoir être et de qualités humaines qui lui permettront de réussir dans son métier. Pour essayer d'accompagner le développement personnel de ses élèves, l'ENSX a créé des cours d'humanités. Ce n'est pas "pipo", c'est une intention louable. Il y a en sortie de prépa des gens qui ne sont pas dotés de qualités humaines exceptionnelles. La majorité des offres d'emploi requérant explicitement à ces mots, il semblait logique de vouloir faire progresser ses élèves là-dessus. Seul souci : les tanches en entrée ressortent toujours tanches en sortie. Les qualités humaines ne s'acquièrent pas avec une présentation en amphi et trois exercices en groupe animés par un coach. Par contre, le remède est pire que le mal. La tanche en sortie n'a pas réellement progressé mais par contre elle a pu prendre conscience de l'ampleur du problème, et ressort avec une confiance en elle moindre que ce qu'elle avait en entrée. Il fallait le faire !
Cela dit, c’est peut-être un pari gagnant à plus long terme ?

Le sport
Autre intention louable de la part de l'ENSX : le sport. Le sport à l'ENSX est l'une des rares activités obligatoires. Officiellement c'est pour apprendre au futur citoyen à entretenir son corps. Officieusement, c'est le seul cours obligatoire ou presque, donc si un élève venait à disparaitre (par exemple s'il venait à abandonner sa scolarité par manque d'envie), ce serait le prof de sport qui s'en apercevrait le premier et serait chargé de faire remonter l'information.....
L’autre manière pour l’école de s’apercevoir d’une absence serait l’arrêt du paiement des frais de scolarité ou autres frais liés à la vie sur le campus. A ce sujet, les frais de scolarité de beaucoup d’écoles d’ingénieurs ont quasi triplé ces dernières années, ce qui, j’en suis sûr, renforce la qualité du tableau ici dressé de ces écoles.

Les langues
Les langues sont l’unique autre activité hebdomadaire obligatoire pour tous les élèves. L’anglais est la langue imposée pour tous, sauf si l’élève est réellement bilingue. Même dans ce dernier cas, l’élève ingénieur est supposé maitriser trois langues avant d’être diplômé, donc un élève bilingue Français Anglais suivra toujours un cours de LV2. Il n’y a pas grand-chose à reprocher à ces cours, ils sont faits en petites classes, adaptées au niveau de chacun, le bon niveau atteint par certains en anglais leur permet de suivre des cours intéressants (debating, conversation..). On peut simplement reprocher la naïveté de quiconque croit que tout élève ingénieur maitrisera trois langues à la fin de son cursus, et continuera de progresser dans ces deux langues étrangères. Il est de la responsabilité de chacun de pratiquer pour progresser en dehors des cours, mais tout le monde ne le fera pas. Le niveau censé être acquis en fin de 3A est le B2. Ceci est déjà ambitieux pour les langues « classiques » (Italien, Espagnol..) mais complètement fou pour les langues à l’alphabet non latin. La direction admet qu’on valide son diplôme avec un niveau A2 en Chinois par exemple.

Si on somme tout ce qu'on a cité ci haut on arrive à environ 25 à 30 heures par semaine pour les plus travailleurs. Alors qu'arrive-t-il lors des 138 autres heures de la semaine ?

L'alcool
Beaucoup d'alcool. Malgré les interdictions et restrictions et suppliques de la part de l'ENSX pour que ses élèves, majeurs, se limitent (il y a réellement des amphis qui pourraient se résumer à "svp ne buvez pas trop :cry: ". Quatre sont prévus rien que pour la première année), la consommation d'alcool reste l'activité favorite de Jean-Jacques, blasé, et de ses camarades. Cela ne se limite pas à l’ENSX, mais c’est un état de fait quasi généralisé.
C'est une consommation très festive. On ne sait pas pourquoi d'ailleurs, étant donné que la proportion de la gent féminine peut descendre typiquement sous les 15%.
Contrairement à une autre génération ou elle était signe de déprime, aujourd'hui cette consommation d'alcool est synonyme de vie sociale. Elle est également excessive. Vraiment. Vous ne me croyez pas ? Rappelez-vous de la raison X pouvant amener un élève à arrêter ses études, citée dans le paragraphe précédent. A plusieurs reprises, ces dernières années, cette raison X fut un décès, directement lié à la consommation d'alcool (et même pas au volant....).


Et l'insertion pro dans tout ça ?
Les stages

Au cours de son cursus, Jean-Jacques est contraint de réaliser deux stages. Un stage en première année et un en troisième année. C'est tout. Deux stages c'est bien mais c’est peu.
Dommage que le premier de ces deux stages soit un stage ouvrier, absolument pas valorisable professionnellement. Ce stage, dixit une ancienne cadre de l'ENSX, "permet de découvrir de l'intérieur la France d'en bas". Ce qui avait provoqué un tollé à l’époque. Pas de prise de position de ma part, no comment.

L'élève ingénieur face à la possibilité de faire ou non une césure se retrouve face à un dilemme économique et moral. Faire une césure d'un an pourra favoriser la suite de son insertion professionnelle. Cependant, ce ou ces deux stages constitueront un an pendant lequel il effectuera un travail, souvent de grande qualité (à l'ENSX nous sommes une école A+, dois-je vous le rappeler), à frais très réduits pour l'entreprise (sal.. gratifications inférieures au smic). Certaines sociétés ont même pour mode de fonctionnement de recruter un maximum de stagiaires afin de fournir du travail à moindre cout(1).

Faut-il donc brader ses compétences (et dévaloriser par là même les conditions de travail des jeunes ingénieurs) dans le but d'améliorer un petit peu son insertion professionnelle, passant devant ses petits camarades ayant moins d'expérience ?
70% des élèves de l'ENSX font ce choix, en dépit de l'avis de la commission des titres d'ingénieurs.
Jean-Jacques pourrait faire le pari inverse, qui pourrait s’avérer, par la suite, gagnant.

L’idée de vouloir acquérir de l’expérience professionnelle avant le diplôme est louable, mais peut-être faudrait-il éviter tout de même de vendre son âme au diable. Certaines autres écoles que l’ENSX recommandent des stages courts à la fin de chaque année, ce qui est peut-être plus pertinent.

L'aide à l'insertion
Les écoles vantent sur leurs plaquettes des conditions d'embauche "excellentes" et laissent penser tout au long du cursus qu'il suffira de se construire un projet professionnel cohérent, de demander un poste cohérent vis à vis de ce projet, pour être pris. Faut-il rappeler que dans le monde réel cela ne se passera pas comme ça ?

Le seul conseil que reçut Jean-Jacques quant à son orientation pro, c'était celui d'aller dans une boite Y en province qui lui proposait un stage. Soit disant, sortant d'une école A+, il pourrait fournir un travail de meilleure qualité que ses collègues provinciaux et être embauché, lançant sa carrière sur une pente ascendante. Pour le premier point cela s'est révélé être en gros vrai, et le raisonnement paraissait cohérent. Par contre, l'entreprise était du type (1) décrit au paragraphe précédent... Pour le coup c'était la faute à pas de chance :lol:

Mais pourquoi l'école ferait-elle une aide à l'insertion sérieuse, vu que trouver un poste "est facile" ?

L'arnaque au premier salaire
La plaquette décrit un salaire brut annuel en sortie d'école. Ce salaire confond France et étranger. Ce salaire est une moyenne et non une médiane. Il est donc supérieur au salaire médian, qui aurait plus de cohérence ici. De plus il est basé sur les réponses au questionnaire premier emploi des jeunes diplômés.
Pour une raison que j'ignore totalement et que je n’arrive pas à comprendre, ces JD gonflent leur salaire.
Il inclut les primes. Le dernier effet kiss cool étant que ce questionnaire premier emploi est envoyé deux mois et demi après la sortie. Or, les diplômés n’ayant toujours pas trouvé à cette date sont bien plus susceptibles d’accepter un salaire plus faible quand ils trouveront, et ils sont peu susceptibles d’avoir déjà refusé un poste bien payé.
(Heureusement, pour une école de la qualité de l’ENSX et contrairement à d’autres formations il ne s’agit pas de dire « s’ils trouveront », le problème est uniquement le prix, quoique certains diplômés mettent jusqu'à un an pour trouver un premier poste qui les satisfont)

Chacun de ces effets peut représenter jusqu'à 10% de différence entre la plaquette et la réalité. Au final, le jeune diplômé peut trouver jusqu'à 30/50% de différence entre la publicité faite par l'école quant à son premier salaire et ce que lui proposeront effectivement les entreprises, en salaire brut de base. Si la situation économique trois ans après son entrée ne s'est pas trop dégradée il pourra espérer compenser 10% de cette perte par des primes.

L’arnaque aux SSII
On vient de signaler ci haut un premier point obscur concernant l’enquête premier emploi : les jeunes diplômés ont tendance à gonfler leur salaire.
On peut maintenant se demander comment font les enquêtes premier emploi pour afficher un % d’embauchés en sous traitance aussi faible.
J’ai personnellement été amené à contacter « beaucoup » de jeunes ingénieurs. Je me suis aperçu que la plupart de ceux-ci étaient en SSII, ou alors avaient commencé en SSII.
Il est difficile de dire exactement comment fait l’ENSX pour afficher un taux d’embauche en SSII si faible. Les leviers d’action entrent probablement dans les catégories suivantes :
- Classification de certaines SSII en « sociétés de conseil ». Il y a une différence fondamentale entre un « vrai » cabinet de conseil et une SSII. Et la mauvaise foi, l’inattention, la méconnaissance ou d’autres raisons ont vite fait de faire basculer une SSII de l’autre côté de la barrière
- Encore une fois, la date d’envoi du questionnaire. Plus le questionnaire est envoyé tôt, et plus les postes occupés par les répondants seront enviables. Car un JD qui se voit proposer juste après la cérémonie de remise de diplômes un poste en SSII avec un petit salaire aura tendance à refuser. Et plus ce JD passera de temps au chômage, plus il se confrontera à la réalité et plus ses chances d’accepter un poste en SSII augmentent.
- Enfin, comme sur le premier salaire, il est possible que ceux qui sont embauchés en SSII ne le signalent pas dans leur enquête premier emploi, pour la même raison qu’ils ont grossi leur salaire.
En tout état de cause, la meilleure estimation que je puisse fournir du nombre de diplômés se retrouvant en SSII en sortie de l’ENSX est d’environ 15% (+/- 10% pour avoir l’intervalle de confiance 99.7%)
Jean-Jacques croyait naïvement que le simple fait d’avoir réussi une bonne école d’ingénieurs lui garantirait un bon début de carrière*. Jean-Jacques, s’il n’y prend garde, se retrouvera après sa sortie rapidement en SSII, avec un salaire 30 à 50% inférieur à celui qu’il pensait avoir.
Jean-Jacques sort de l'ENSX, Jean-Jacques est déception.


*Cette croyance est répandue chez les jeunes taupins et il convient ici d’y mettre un terme.
Dernière modification par Jay Olsen le 12 juil. 2017 20:47, modifié 1 fois.
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Re: Ce qu'il ne faut pas attendre d'une école d'ingénieurs

Message par U46406 » 12 juil. 2017 20:40

Jay Olsen a écrit :
12 juil. 2017 20:29
Appelons là "l'ENSX"
s / là / la
« Occupez-vous d’abord des choses qui sont à portée de main. Rangez votre chambre avant de sauver le monde. Ensuite, sauvez le monde. » (Ron Padgett, dans Comment devenir parfait) :mrgreen:

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Message par Hamrock » 12 juil. 2017 20:41

Sinon, il y en a qui font des blogues. :mrgreen:
Comparatif général des prépas : http://forum.prepas.org/viewtopic.php?f=20&t=66791

Classement personnalisable des Grandes Ecoles et des Lycées (màj 2018) : http://forum.prepas.org/viewtopic.php?f=24&t=55173

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Re: Ce qu'il ne faut pas attendre d'une école d'ingénieurs

Message par Jay Olsen » 12 juil. 2017 20:48

U46406 a écrit :
12 juil. 2017 20:40
Jay Olsen a écrit :
12 juil. 2017 20:29
Appelons là "l'ENSX"
s / là / la
Oh pardon merci
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Re: Ce qu'il faut attendre d'une école d'ingénieurs du numérique

Message par U46406 » 12 juil. 2017 20:53

La fédération Syntec - et plus particulièrement Syntec numérique - te demandera sans doute gentiment de parler de ne plus parler de SSII mais des ESN ... :)
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Re: Ce qu'il faut attendre d'une école d'ingénieurs moderne

Message par U46406 » 12 juil. 2017 21:12

Jay Olsen a écrit :
12 juil. 2017 20:29
L'intérêt des cours
Que penses-tu du système de boîtiers de vote électronique ?
(qui permet au prof d'avoir un retour instantané à un instant donné, pour savoir qui / quelle proportion de l'audience suit ou qui a compris, ou qui a décroché...)


édit - y en a qui déboursent 7 500 euros pour savoir comment faire pour créer une formation innovante :
https://www.exed.centralesupelec.fr/en/ ... eur-web-20
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Re: Ce qu'il faut attendre d'une école d'ingénieurs moderne

Message par Jay Olsen » 12 juil. 2017 21:23

U46406 a écrit :
12 juil. 2017 21:12
Jay Olsen a écrit :
12 juil. 2017 20:29
L'intérêt des cours
Que penses-tu du système de boîtiers de vote électronique ?
(qui permet au prof d'avoir un retour instantané à un instant donné, pour savoir qui / quelle proportion de l'audience suit ou qui a compris, ou qui a décroché...)


édit - y en a qui déboursent 7 500 euros pour savoir comment faire pour créer une formation innovante :
https://www.exed.centralesupelec.fr/en/ ... eur-web-20
C'est marrant, c'est pas un sujet très important mais ça vaut le coup d'en parler vite fait :p

Clickapad, on a payé 50€ et on était tous comme des fous à l'amener à chaque cours, dans l'espoir qu'on s'en serve enfin, alors qu'on s'en servait jamais.
Au final on a du s'en servir trois fois dans l'année, mais au moins chaque fois qu'on en a eu besoin on l'avait sur nous !
Ca fait cher à l'utilisation
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Re: Ce qu'il ne faut pas attendre d'une école d'ingénieurs

Message par Nicolas G » 12 juil. 2017 21:42

Même si il me reste un an dans mon ENSX (qui correspond bien au nom pour moi :wink: ) je suis assez d'accord, c'est une discussion qui revient souvent entre les élèves.

Je compléterai certains points (de mon point de vue).

Jean-Jacques va peut être travailler plus d'un soir avant le partiel, parce qu'il veut avoir la filière qui l'intéresse ou un bon échange à l'international, ou juste parce que revenir à l'école pour les rattrapages c'est pas cool. Mais au lieu d'essayer de comprendre le cours il va chercher des annales (parfois peu accessibles, mais vu qu'il est pote avec Jean Eude en 3A il peut les avoir) et des tds, parce qu'il a une chance sur deux que le même sujet retombe.

Pour les cours de sport, c'est un théorème plus général avec l'énoncé : "L'administration accorde une importance à la présence de l'élève inversement proportionnelle à l'intérêt scolaire du cours".

Pour les cours non scientifiques, on peut trouver deux types (à la shadok) : les cours de culture générale type droit, économie...qui sont parfois lassants mais où on apprend vraiment des choses, Jean Jacque pourra peut-être mieux comprendre certains articles de journaux et comprendra que certains dans les vidéos et les commentaires qu'ils regardent disent vraiment n'importe quoi. Puis il y a les cours que certains disent pipo, qui consistent à savoir si on est plutôt rouge ou bleu, à faire un powerpoint bidon le jour de l'oral pendant que le groupe d'avant présente. Jean-Jacques se rendra compte que placer quelques mots scientifiques réussira à faire passer son néant pour un projet réfléchi, surtout quand le prof prétend avoir 20 ans d'expérience dans une boîte du CAC40.

Et le problème c'est que les profs compétents, qui sont pédagogues et investis, qui réfléchissent chaque année à la meilleure façon de faire apprendre et comprendre (et oui ça existe) se retrouvent face à une bande de Jean Jacques (quand ils viennent en cours), et ça les déprime.
Du coup il y a majoritairement des profs qui en ont rien à faire ou dépités...et c'est pareil pour les élèves. C'est un peu triste :(
Hamrock a écrit :
12 juil. 2017 20:41
Sinon, il y en a qui font des blogues. :mrgreen:
Si t'as des liens intéressants je suis preneur :wink:
Lycée Masséna PCSI 833 PSI 935 3/2 5/2 (2012-2015)
ENSIMAG (2015-2018) Master en mathématiques appliquées MSIAM (2016-2018)
Doctorat en mathématiques appliquées (tomographie médicale) (2018-20XX)

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Re: Ce qu'il ne faut pas attendre d'une école d'ingénieurs

Message par darklol » 12 juil. 2017 22:21

Franchement Jay Olsen ouvre un blog! Mais en tout cas très bon texte, plutôt représentatif de la réalité (sans ironie). C'est assez différent dans une ENS (la mienne en tout cas) mais on y retrouve quand même quelques points (notamment sur la pédagogie des profs et la qualité générale de certains cours).
ENS Lyon
Ingénieur de recherche

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