Re: Intérêt du "prestige" d'une prépa ?
Publié : 28 févr. 2018 12:08
Merci de revenir au sujet.
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eragon a écrit : ↑28 févr. 2018 14:19Bonjour à tous,
j'avoue avoir décidé de ne plus intervenir, mais les messages privés que j'ai reçus m'incitent à donner quelques éléments de réponse. Je remercie les auteurs de ces messages privés, qui m'ont montré deux choses, la première que mon indignation a été partagée (c'est sain et rassurant de mon point de vue), la deuxième que beaucoup s'autocensurent pour ne pas répondre et pour ne pas l'exposer. Nous pourrions nous interroger sur l'origine de ce monopole de la parole (j'ai une idée précise). Je remercie au passage les différents exégètes littéraires pour leurs interventions que j'ai lues avec intérêt.
Quelques éléments de réponse donc...
Je fus élève d'une classe que Bullquies, Askenian et autres auraient estimé (une prépa "de très bon niveau" pour reprendre leur terminologie). J'y ai eu en deuxième année ceux qui furent à peu près les pires enseignants de ma scolarité : probablement très forts, mais sans le moindre sens humain et pédagogique. La préparation que j'ai reçue, de mon point de vue, a été assez minable. Une classe constituée exclusivement d'excellents élèves qui n'avaient besoin de personne (à peu près) pour réussir, et des enseignants maniant le fouet et l'humiliation pour faire avancer l'attelage. Je n'en tire évidemment aucune généralité (j'imagine facilement que d'autres ont rencontré dans ce type de classe les meilleurs enseignants de leur cursus), ce fut uniquement mon vécu. Je ne nie pas avoir probablement bénéficié de l'émulation inhérente à une classe constituée d'excellents élèves, j'y ai aussi observé l'effondrement psychologique de certains camarades (dont un fut retrouvé marchant seul au bord d'une autoroute). Encore une fois je n'en tire strictement aucune généralité.
A la fin de mon cursus et après mes années d'ENS j'ai été nommé dans une prépa "trou du cul du classement" comme dit Bullquies, pour y faire une "préparation de faible niveau" comme dit Askenian. Il est vrai que je n'y ai pas reconnu le type de classe que j'avais connu élève. J'y ai rencontré évidemment une énorme hétérogénéité, mais j'y ai aussi trouvé des collègues bien plus investis que les professeurs que j'avais pus avoir (je n'en tire toujours aucune généralité). Nous avons travaillé, nous nous sommes donnés pendant toutes ces années, et nous avons obtenu quelques jolis succès. Trois X (oui, en 10 ans), une élève qui obtient 20 à l'écrit de Centrale sur l'épreuve que je prépare, un autre élève qui obtient 20 à l'oral CCP sur l'épreuve que je prépare. Ces élèves ont-ils eu une préparation de faible niveau ? Je ne suis pas d'accord. Ils ont eu une préparation à la hauteur de leurs capacités. Je suis habitué au discours "prépa mal classé par l'étudiant = préparation à deux balles", et usuellement je ne réagis pas. J'ai trouvé pour le coup que la vulgarité de l'attaque méritait une réponse. Une autre partie du message auquel j'ai répondu m'a choqué : il s'agissait d'un mépris tout à fait manifeste et affiché pour une école ou un type d'école (les prépas "trou du cul du classement ne préparent qu'à..."). Effectivement un nombre important de mes élèves intègre ou a intégré ce type d'école. Et ? Qui êtes-vous pour les mépriser ? Un élément d'information pour vous (même si je suis absolument certain que cela vous fera ricaner... On ne sait pas tout à 20 ans...Mais on a plein de certitudes) : savez-vous que peut-être certains de ces élèves gagneront plus que vous, tous Centraliens ou autres que vous êtes ? J'ai récemment eu des nouvelles d'un élève issu d'une école E3A qui est parti aux Etats-Unis où il a créé une biotech qui marche du feu de Dieu. Un cursus, ce n'est pas simplement une école, c'est une école et tout ce qui va suivre. J'ai bien conscience de la fierté de ceux qui affichent leur CV en signature, c'est souvent parce que le concours réussi est une jolie réussite, mais sachez, admettez, que ce n'est qu'un joli point de départ... J'anticipe déjà les réponses rageuses : non je ne suis pas en train de dire que E3A c'est mieux que Centrale... J'affirme simplement que les choses ne sont pas aussi simples que : il y a un classement et puis voilà, les derniers ils sont mauvais (tous, les élèves, les profs, et pourquoi pas les murs du lycée d'où suinte l'échec ?) et les premiers ben ils sont bons (tous, les élèves, les profs, et pourquoi pas les murs du lycée d'où suinte la réussite ?).
Alors choisir la prépa haut de gamme ou la prépa près de chez soi, c'est aussi une question de volonté et de psychologie. A 18 ans personne ne m'aurait fait choisir la prépa près de chez moi, j'avais envie d'en découdre (je n'ai pas été déçu), mais j'ai pu observer dans mon métier que certains élèves avaient fait le choix de la prépa près de chez eux et ne s'en sont pas plus mal sortis. Je crois que tous méritent un tout petit peu plus de respect que ce que j'ai pu lire. Je n'interviendrai plus sur ce sujet.
Bien cordialement
J'avoue. On est tellement plus intelligents que ces andouilles de sociologues qui parlent de déterminisme social et de milieu social.Des études a écrit : ↑28 févr. 2018 14:33Et c'est finalement la personne qui incarne son potentiel et non pas la prépa/école dont il est issue..
Totalement d'accord.
Merci pour cette réponse.eragon a écrit : ↑28 févr. 2018 14:19Bonjour à tous,
j'avoue avoir décidé de ne plus intervenir, mais les messages privés que j'ai reçus m'incitent à donner quelques éléments de réponse. Je remercie les auteurs de ces messages privés, qui m'ont montré deux choses, la première que mon indignation a été partagée (c'est sain et rassurant de mon point de vue), la deuxième que beaucoup s'autocensurent pour ne pas répondre et pour ne pas l'exposer. Nous pourrions nous interroger sur l'origine de ce monopole de la parole (j'ai une idée précise). Je remercie au passage les différents exégètes littéraires pour leurs interventions que j'ai lues avec intérêt.
Quelques éléments de réponse donc...
Je fus élève d'une classe que Bullquies, Askenian et autres auraient estimé (une prépa "de très bon niveau" pour reprendre leur terminologie). J'y ai eu en deuxième année ceux qui furent à peu près les pires enseignants de ma scolarité : probablement très forts, mais sans le moindre sens humain et pédagogique. La préparation que j'ai reçue, de mon point de vue, a été assez minable. Une classe constituée exclusivement d'excellents élèves qui n'avaient besoin de personne (à peu près) pour réussir, et des enseignants maniant le fouet et l'humiliation pour faire avancer l'attelage. Je n'en tire évidemment aucune généralité (j'imagine facilement que d'autres ont rencontré dans ce type de classe les meilleurs enseignants de leur cursus), ce fut uniquement mon vécu. Je ne nie pas avoir probablement bénéficié de l'émulation inhérente à une classe constituée d'excellents élèves, j'y ai aussi observé l'effondrement psychologique de certains camarades (dont un fut retrouvé marchant seul au bord d'une autoroute). Encore une fois je n'en tire strictement aucune généralité.
A la fin de mon cursus et après mes années d'ENS j'ai été nommé dans une prépa "trou du cul du classement" comme dit Bullquies, pour y faire une "préparation de faible niveau" comme dit Askenian. Il est vrai que je n'y ai pas reconnu le type de classe que j'avais connu élève. J'y ai rencontré évidemment une énorme hétérogénéité, mais j'y ai aussi trouvé des collègues bien plus investis que les professeurs que j'avais pus avoir (je n'en tire toujours aucune généralité). Nous avons travaillé, nous nous sommes donnés pendant toutes ces années, et nous avons obtenu quelques jolis succès. Trois X (oui, en 10 ans), une élève qui obtient 20 à l'écrit de Centrale sur l'épreuve que je prépare, un autre élève qui obtient 20 à l'oral CCP sur l'épreuve que je prépare. Ces élèves ont-ils eu une préparation de faible niveau ? Je ne suis pas d'accord. Ils ont eu une préparation à la hauteur de leurs capacités. Je suis habitué au discours "prépa mal classé par l'étudiant = préparation à deux balles", et usuellement je ne réagis pas. J'ai trouvé pour le coup que la vulgarité de l'attaque méritait une réponse. Une autre partie du message auquel j'ai répondu m'a choqué : il s'agissait d'un mépris tout à fait manifeste et affiché pour une école ou un type d'école (les prépas "trou du cul du classement ne préparent qu'à..."). Effectivement un nombre important de mes élèves intègre ou a intégré ce type d'école. Et ? Qui êtes-vous pour les mépriser ? Un élément d'information pour vous (même si je suis absolument certain que cela vous fera ricaner... On ne sait pas tout à 20 ans...Mais on a plein de certitudes) : savez-vous que peut-être certains de ces élèves gagneront plus que vous, tous Centraliens ou autres que vous êtes ? J'ai récemment eu des nouvelles d'un élève issu d'une école E3A qui est parti aux Etats-Unis où il a créé une biotech qui marche du feu de Dieu. Un cursus, ce n'est pas simplement une école, c'est une école et tout ce qui va suivre. J'ai bien conscience de la fierté de ceux qui affichent leur CV en signature, c'est souvent parce que le concours réussi est une jolie réussite, mais sachez, admettez, que ce n'est qu'un joli point de départ... J'anticipe déjà les réponses rageuses : non je ne suis pas en train de dire que E3A c'est mieux que Centrale... J'affirme simplement que les choses ne sont pas aussi simples que : il y a un classement et puis voilà, les derniers ils sont mauvais (tous, les élèves, les profs, et pourquoi pas les murs du lycée d'où suinte l'échec ?) et les premiers ben ils sont bons (tous, les élèves, les profs, et pourquoi pas les murs du lycée d'où suinte la réussite ?).
Alors choisir la prépa haut de gamme ou la prépa près de chez soi, c'est aussi une question de volonté et de psychologie. A 18 ans personne ne m'aurait fait choisir la prépa près de chez moi, j'avais envie d'en découdre (je n'ai pas été déçu), mais j'ai pu observer dans mon métier que certains élèves avaient fait le choix de la prépa près de chez eux et ne s'en sont pas plus mal sortis. Je crois que tous méritent un tout petit peu plus de respect que ce que j'ai pu lire. Je n'interviendrai plus sur ce sujet.
Bien cordialement