Après l'ENS

[Hoetre]

Je sais que ce sujet a probablement déjà été traité, mais j'aimerais préciser un peu mon cas.

Je fais simple, à ce jour j'aimerais intégrer une ENS en premier voeux, mais cela exclusivement pour devenir prof (de maths) dans le supérieur (prépa dans l'idéal). "Exclusivement" en ce sens où je ne veux (à ce jour) absolument pas faire de recherche. (Je supporte mal de rester une heure sur le même exo, alors des années sur le même problème...).
Le truc, c'est que j'ai un peu peur de changer d'avis, une fois à l'ENS de me rendre compte que je n'ai pas envie de faire des maths toute ma vie, ou de me dire que finalement, l'enseignement ça ne correspond pas à ce que je recherche comme avenir... bref.

Donc la question et la suivante : je sais qu'après l'ENS, on peut aller travailler dans le privé, moyennant un rachat de notre engagement auprès de l'état par une entreprise ou des choses comme ça, mais est-ce (comme les normaliens nous disent parfois) "comme si on avait fait une grande école d'ingé" ? En gros, si je décidais d'aller à l'ENS plutôt qu'à l'X, l'ECP etc, et que finalement je voulais retourner dans le privé, n'aurais-je pas des regrets / du mal à trouver un boulot ?
Y a-t-il des domaines du privé qu'on se ferme en allant à l'ENS ? (Je me dis - peut-être à tort - que la formation en terme de management à l'ENS ne doit pas être équivalente à celle de l'ECP).

Merci

[Raphaëlle]

La formation en management à l'ENS est nulle, donc sur ce point là c'est forcément mieux à l'ECP...
Pour aller dans le privé, le mieux ça semble quand même de faire en 4eme année voire dès la 3eme une année en école d'ingé (venant de Lyon par exemple, il y a moyen d'aller aux ponts par ex), pour "sortir d'une école d'ingé". Après ya les corps de l'état, qui permettent de faire autre chose que recherche ou enseignement (mais pas dans la privé, du moins au début).

En gros, le privé c'est pas prévu à l'ENS, mais il doit toujours y avoir moyen d'y aller si on s'y prend assez tôt et qu'on est motivé (comprendre : il va falloir se débrouiller tout seul). Quant à l'engagement décénal, c'est pas clair, il semble qu'il suffit de se faire oublier pour régler le problème.

[Retard]

Je fais simple, à ce jour j'aimerais intégrer une ENS en premier voeux, mais cela exclusivement pour devenir prof (de maths) dans le supérieur (prépa dans l'idéal). "Exclusivement" en ce sens où je ne veux (à ce jour) absolument pas faire de recherche. (Je supporte mal de rester une heure sur le même exo, alors des années sur le même problème...).
Le truc, c'est que j'ai un peu peur de changer d'avis, une fois à l'ENS de me rendre compte que je n'ai pas envie de faire des maths toute ma vie, ou de me dire que finalement, l'enseignement ça ne correspond pas à ce que je recherche comme avenir... bref.

Tant mieux si tu changes d'avis. Non pas que l'enseignement soit une mauvaise idée, mais je pense que c'est pas plus mal si tu peux envisager de faire autre chose après l'ens que devenir prof de prépa sans faire de recherche. Ou plutôt, c'est pas plus mal si tu peux envisager une voie de sortie. Parce que l'agrégation n'est pas (est loin d'être) une garantie de poste en prépa.

Aller à l'ENS dans l'optique de ne jamais faire de recherche et enseigner en prépa, ça signifie prendre un risque de se retrouver prof devant des 1ere L dans un lycée de la banlieue parisienne...

[Hoetre]

Ouais, je sais... Et c'est bien ça qui m'embête. Disons qu'aujourd'hui, si on me disais "tu intègres l'ENS, tu as l'agreg, tu te retrouves à enseigner en prépa (ou fac, mais en fac faut faire de la recherche...)" je signerais de suite. Mais je sais que ce n'est pas si facile, et que les choses ne vont pas vraiment en s'arrangeant.
Par contre y'a des trucs que je ne comprends pas trop quant aux affectations, on dit que c'est devenu très difficile d'obtenir un poste en prépa, et en même temps je connais un mec qui a fait une école d'ingé lambda, qui a passé l'agreg après parce que finalement il ne voulait pas taff dans le privé, et qui a 30ans était prof en prépa. Alors certes, dans une toute petite prépa d'une petite ville, mais moi ça me conviendrait très bien ^^

Bon en tout cas, merci de vos réponses, même si ça me refroidit un peu quant à l'ens...
Ah bah, tant qu'on y est, question réciproque : est-ce qu'il est possible de faire de l'enseignement après avoir fait l'X ? Je sais que pour la recherche, c'est possible, l'X s'en vante assez pour piquer du monde à l'ENS, mais peut-on raisonnablement préparer l'agreg (en espérant y avoir un bon classement) en ayant fait l'X ?

Et pour ce qui est des grands corps d'état, j'aimerais votre avis pour savoir de façon purement subjective, est-il plus facile de les intégrer venant de l'X ou de l'ENS ? (Je sais qu'à l'X il y a plus de place, mais plus de candidats aussi, et ils sont probablement - mais je me trompe peut-être - plus intéressés ?).

[heavenhel]

Tu peux enseigner en fac (française) sans faire de recherche : il faut viser un statut de PRAG (ou à plus court terme d'APGR dans les ENS). C'est plus ou moins répandu selon les facs et les matières. Ça peut être une alternative intéressante au poste en classes prépa. A priori ce genre de poste devrait se développer puisque normalement seuls des PRAGs devraient enseigner en L1.

Pour le poste en prépa, très clairement les maths c'est le bon plan : si on omet les A/L toutes les filières de prépa ont des maths avec pas mal d'heures. Rajoute que l'agreg de maths est loin d'être la plus dure (à comparer aux agregs en LSH ou même en PC/SVT)... Le plus important c'est ton rang en l'agreg. Ensuite comptent ton parcours (thèse, khôlles, correcteur de concours...). Très honnêtement, si tu es normalien, que tu bosses à l'ENS et en prépa agreg et que tu fais une thèse, je vois pas de raison que ça casse. Après, tu devras peut-être enseigner quelques années en lycée/collèges/fac mais ça peut être un bien.

[ET]

Je n'y suis pas encore, mais obtenir un poste en prépa n'est pas donné à tous les agrégés mais pas non plus si difficile que ça, surtout en maths. Clairement si tu entres à l'ENS tu as toutes tes chances.

Il me semble difficile pour toi de dire dès aujourd'hui que tu ne veux pas du tout faire de recherche, pour la bonne raison que tu ne connais pas du tout. Beaucoup de gens changent d'avis au cours de leurs stages, et certains qui sont entrés à l'ENS en même temps que moi, sûrs à 100% de vouloir enseigner, sont en thèse sans avoir passé l'agreg .

Pour se diriger vers le secteur privé, ce n'est pas courant donc pas bien balisé, mais c'est possible. Comme qqn l'a dit avant moi, ça suppose en général de passer deux ans à l'ENS et la suite de ta scolarité dans une école d'ingé avec laquelle il y a un partenariat. L'orientation naturelle est ensuite une thèse, souvent CIFRE, puis un travail en R&D plutôt qu'en management, au moins au début.

Il est possible de passer l'agreg et de l'obtenir avec un très bon rang en sortant de l'X. Mon prof de maths de sup l'avait fait. Cependant, de la même façon qu'aller dans le privé n'est pas naturel à l'ENS, se destiner à l'enseignement n'est pas naturel à l'X. Tu y rencontreras donc des difficultés analogues.

En résumé, si je comprends bien ton dilemme, tu as un projet n°1 qui semble clair, l'enseignement. Une ENS est la meilleure école pour le réaliser, et tu en es bien conscient. Là où ça coince c'est sur le projet n°2, celui de l'ENS (la recherche) te tentant moins que d'aller travailler en entreprise (pour y faire quoi d'ailleurs ?). Honnêtement, je te conseille de privilégier l'ENS quand même. D'une part c'est là que ton premier choix d'avenir se fera le plus naturellement, et d'autre part tu ne connais pas encore la recherche ... et combien même ça te déplairait et l'agreg se passerait mal, tu pourras toujours bifurquer vers un métier en entreprise.

[compte supprimé]

Il y a un truc qui me choque un peu ... Il y a souvent des normaliens qui enseignent au collège/lycée ?

[heavenhel]

oui puisque dans beaucoup de matières, tu passes quelques années en collège/lycée avant d'avoir un poste en prépa

Indépendamment de ça, ce qui compte c'est ton rang à l'agreg et des normaliens qui ont des rangs à l'agreg ne permettant pas d'avoir des prépas, c'est pas rare (voire fréquent, ça dépend des matières). Après, souvent ils l'ont choisit (ils auraient pu faire une thèse, tenter une carrière de maitre de conf...).

[Raphaëlle]

Il y a un truc qui me choque un peu ... Il y a souvent des normaliens qui enseignent au collège/lycée ?

Au lycée très souvent, au collège faut quand même l'avoir cherché (pour un agrégé évidemment, un normalien certifié ira au collège comme tous les certifiés en début de carrière.). D'ailleurs le fait d'être normalien ne change (quasiment) rien (dans les faits les normaliens ont souvent les meilleurs classements, mais c'est pas parce qu'ils sont normaliens).

Quasiment tout le monde commence au lycée, sauf des rares chanceux qui cumulent bon rang et chance (une place qui se libère au bon moment... et encore, parfois la place ne se libère que pendant quelques mois, après retour en 2nde). Et à moins d'être marié avec enfant (ou handicapé), on commence en lycée à Créteil ou Versailles (sauf la 1ere année, où on est là où on veut, mais ça ne dure pas)

Mais après, on peut demander tous les ans une prépa, et un jour, peut être...

[Hoetre]

Sinon, ce n'est pas non plus immédiat d'avoir l'agreg de maths, d'avoir l'agreg de maths avec un bon rang, de faire une thèse etc... de sorte à avoir un poste en prépa... Oui oui, même en maths...

Bah ouais, c'est ce que je me dis. Rien n'est gagné et j'ai peur de me fermer des voies en allant à l'ens...

En résumé, si je comprends bien ton dilemme, tu as un projet n°1 qui semble clair, l'enseignement. Une ENS est la meilleure école pour le réaliser, et tu en es bien conscient. Là où ça coince c'est sur le projet n°2, celui de l'ENS (la recherche) te tentant moins que d'aller travailler en entreprise (pour y faire quoi d'ailleurs ?). Honnêtement, je te conseille de privilégier l'ENS quand même. D'une part c'est là que ton premier choix d'avenir se fera le plus naturellement, et d'autre part tu ne connais pas encore la recherche ... et combien même ça te déplairait et l'agreg se passerait mal, tu pourras toujours bifurquer vers un métier en entreprise.

Tu as très bien compris mon dilemme, et je te remercie de ma réponse. le "pour y faire quoi d'ailleurs" est encore assez flou. Mais grosso-modo ce serait plutôt pour faire du management, justement, que de la R&D. En fait, ce qui me plait dans l'enseignement, c'est la relation prof-élève, et de communiquer, d'avoir la sensation de mener une équipe. Dans "devenir prof de maths" m'importe plus de devenir prof que de faire des maths en fait. Enfin, j'adore les maths, bien entendu, mais j'aime surtout parler de maths, de physique dans une moindre mesure, j'adore expliquer aux gens certains trucs. Cette année en 5/2 dans ma classe je me régale parce que je peux régulièrement expliquer aux 3/2 certains points etc.
Et je me dis - mais en fait il faut savoir que je ne connais absolument rien au monde de l'entreprise, mes parents étant instit' - que dans une équipe, où on monte un projet, tout ce genre de truc... Je m'amuserais bien aussi. Puis on gagne des sous, je sais que ça ne doit pas être une priorité, mais j'en fais un critère (parce que je sais que j'ai des goûts onéreux ; j'ai envie de partir en voyage, d'avoir une piscine, j'aime aller au resto...). Donc je sais qu'en étant prof en prépa (ou en fac il parait), on gagne bien sa vie, mais je sais qu'en collège-lycée on gagne moins.

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Puis le truc aussi c'est que je ne connais pas le métier de prof (vu côté prof) et ça me fait un peu peur. Avant je me disais que c'était forcé que j'aime ça, mais récemment j'ai rencontré une jeune prof de maths, qui faisait pourtant à Thiers (au collège, pas en prépa) qui est un bon établissement etc etc, et qui avait carrément déchanté en 3ans d'enseignement. Comme elle me disait, "t'être donnée à fond jusque là pour expliquer qu'il existe des entiers négatifs à des gamins qui n'en ont, pour la plupart, rien à foutre de ce que tu dis...".
Et paradoxalement, je me dis aussi que si j'ai envie de faire prof, c'est peut-être aussi parce que c'est la seule chose que je connais, j'ai eu très peu de contact avec des gens qui travaillent dans le privé. Donc forcément je n'ai pas de "modèle". Mais peut-être qu'en réalité ça me conviendrait mieux ?
Bref, je sais que c'est le genre de chose qu'il vaut mieux mûrement réfléchir. Enfin, de toute façon je ne suis pas là pour faire une séance de psycho ^^

En tout cas, je vous remercie de votre aide